Dans un jugement du 9 février 2024, (TA Bordeaux, 9 février 2024, n°2104900), le Tribunal Administratif de Bordeaux est venu censurer un refus de permis de construire portant sur la construction d’une centrale photovoltaïque émanant de la Préfecture de la Dordogne.

Faits :

La Préfecture estimait, notamment, que le projet ne pouvait pas s’implanter en zone agricole, ne comportant pas de réel volet agricole.
La solution agricole envisagée par le pétitionnaire était remise en question par la Préfecture puisqu’en cours de projet, le zonage de la parcelle avait évolué.

Ainsi, au moment du dépôt du permis de construire le zonage du PLU situait l’ensemble des terrains en AU, c’est-à-dire en zone à urbaniser. Toutefois, un plan local d’urbanisme intercommunal avait été arrêté en cours de procédure, faisant évoluer le zonage desdits terrains en zone A, c’est-à-dire en zone agricole.

Malgré ce changement, la société pétitionnaire avait pu, en cours de procédure, élaborer un projet « d’agrivoltaïsme ».

C’est, donc, dans ce cadre que le Commissaire enquêteur a rendu un avis favorable au projet.
Étonnement, par un arrêté du 5 août 2021, la Préfecture a rejeté la demande de permis de construire,
déniant au projet de la société Photosol la qualification d’agrivoltaïsme  , malgré les conclusions de l’enquête publique.

Le pétitionnaire a été contraint de saisir le Tribunal Administratif de Bordeaux de ce litige.

Le jugement :

Le Tribunal Administratif a considéré, pour sa part, que  :

«6. Pour vérifier si les exigences imposées au 1° de l’article L. 151-11 du code de l’urbanisme est satisfaite, il appartient à l’administration, sous le contrôle du juge de l’excès de pouvoir, d’apprécier si le projet permet l’exercice d’une activité agricole, pastorale ou forestière significative sur le terrain d’implantation, au regard des activités qui sont effectivement exercées dans la zone concernée du plan local d’urbanisme ou, le cas échéant, auraient vocation à s’y développer, en tenant compte notamment de la superficie de la parcelle, de l’emprise du projet, de la nature des sols et des usages locaux.

 8. Il ressort des pièces du dossier que si le projet initial déposé en mairie ne comportait pas explicitement de volet agrivoltaïque, cela s’explique par la circonstance qu’à la date de dépôt du permis les terres étaient classées en zone AU. Le projet a en conséquence évolué au cours notamment de l’enquête publique et se présentait alors à la clôture de l’enquête comme un projet agrivoltaïque. Il est prévu par la société l’installation sur le terrain d’une exploitation agricole d’ovins qui sera exploitée par des agriculteurs voisins du terrain d’assiette à Sigoulès, pour diversifier leur activité et permettre l’extension de leur zone de pâturage pour les brebis. Il ressort des pièces du dossier que les installations seront édifiées en hauteur à 80 cm et selon un écart inter-rang suffisant de 3,5 mètres pour permettre la libre déambulation des ovins sur une parcelle de 15 hectares, laissant ainsi une surface de pâture de 12 hectares. Dans ces conditions, le projet d’agrivoltaïque, proposé à la date du dépôt de la demande, doit être regardé comme étant compatible avec la zone d’implantation concernée dans la mesure où il permet la mise en place et l’exercice d’une activité agricole significative. Par suite, la société requérante est fondée à soutenir que le second motif retenu par le préfet, est également entaché d’une erreur d’appréciation. »

Les leçons à tirer du jugement

Ce jugement rappelle les critères jurisprudentiels en vigueur pour l’implantation d’un projet photovoltaïque en zone agricole. Trop souvent, les services instructeurs exigent que l’activité agricole soit prépondérante dans le projet. Or, il s’agit d’une demande illégale.

En effet, une activité agricole peut parfaitement être accolée à l’exploitation d’un parc photovoltaïque, sans qu’il y ait besoin de déterminer l’activité prépondérante.

En zone agricole, le Préfet, compétent pour délivrer un permis de construire pour un parc photovoltaïque au sol, doit uniquement s’assurer du maintien de la vocation agricole, pastorale ou forestière  significative de la zone :

« 3. Les dispositions de l’avant-dernier alinéa de l’article L. 123-1 du code de l’urbanisme, éclairées par les travaux préparatoires de la loi du 27 juillet 2010 de modernisation de l’agriculture et de la pêche dont elles sont issues, ont pour objet de conditionner l’implantation de constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs dans des zones agricoles à la possibilité d’exercer des activités agricoles, pastorales ou forestières sur le terrain où elles doivent être implantées et à l’absence d’atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages. Pour vérifier si la première de ces exigences est satisfaite, il appartient à l’administration, sous le contrôle du juge de l’excès de pouvoir, d’apprécier si le projet permet l’exercice d’une activité agricole, pastorale ou forestière significative sur le terrain d’implantation du projet, au regard des activités qui sont effectivement exercées dans la zone concernée du plan local d’urbanisme ou, le cas échéant, auraient vocation à s’y développer, en tenant compte notamment de la superficie de la parcelle, de l’emprise du projet, de la nature des sols et des usages locaux. » (CE, 31 juillet 2019, Photosol, n°418739).

Il importe, donc, peu, au sens de l’article L. 151-11 du code de l’urbanisme, que le projet ait été conçu comme « agrivoltaïque ». Le Tribunal Administratif rappelle que c’est concrètement que l’on doit analyser si le projet envisagé permet, in fine, une co-activtié sur la ou les parcelles en cause.

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